Dans les États-Unis ségrégationnistes, naît une figure iconique de la défense des droits des femmes et LGBTQI+ noires. Cette intellectuelle s’est battue toute sa vie pour donner une voix aux opprimé·es.

Une enfance dans l’ignorance

Audre Lorde est née en 1934 de parents antillais venus s’installer à Harlem (USA) durant la période d’entre-deux-guerres, dans l’espoir d’améliorer leur condition sociale et d’assurer un avenir à leurs enfants. Lorde et ses deux grandes sœurs grandissent dans l’ignorance de la ségrégation raciale, leurs parents pensant les protéger en taisant le racisme ambiant.

Elle commence seulement à parler vers l’âge de cinq ans, période à laquelle elle est pour la première fois confrontée au racisme : dans le bus, une femme blanche a des mouvements de recul en la regardant avec dégoût. Plus tard, elle prendra également conscience du regard biaisé de ses manuels scolaires, qui ne relataient que les récits, expériences ou découvertes de personnes blanches, les Noir·es n’y étant pas représenté·es.

Les prémisses de son engagement

C’est à treize ans que Lorde écrit ses premiers vers. Étudiante dans un lycée à majorité blanche, elle entre dans un club de poésie. Les poèmes lui permettent d’accéder au langage et deviendront sa meilleure arme de lutte pour s’engager politiquement. Toute sa vie, elle tentera de faire comprendre que le silence ne l’a pas protégée et ne protégera personne. Via ses poèmes, elle engage aussi un retour aux sources pour la poésie afro-américaine. Elle chante ses poèmes en public, leur donne un rythme et ne mâche jamais ses mots, faisant en sorte que son auditoire ne puisse que se sentir concerné.

Un combat aux multiples facettes

Pendant longtemps, Lorde s’est sentie en marge des autres : fille d’immigrés, pauvre, Noire, lesbienne et déclarée aveugle. Mais lorsqu’elle décide de prendre la parole et de s’engager, elle choisit de faire le lien entre toutes ces causes d’oppression, sans aucune concession sur l’une des facettes de son identité qui lui donnent, toutes ensemble, la force de se battre.

Elle participe notamment, en 1974, à la création du collectif Combahee River, dont l’objectif est de pointer la multiplicité des moyens d’oppression. En 1980, elle contribue à la mise en place d’une maison d’édition dont la mission est de publier des auteures non-blanches, écrivaines trop souvent oubliées des bibliothèques et librairies.

© Elsa Dorfman – Wikimedia

La FUCID

À travers ses analyses et études en éducation permanente, la FUCID ouvre un espace de réflexion collective entre les militant·es du monde associatif, les citoyen·nes du Nord et du Sud et des enseignant·es / chercheur·ses. En multipliant les regards et les angles d’approche sur les questions de société liées à la solidarité mondiale, la FUCID propose de renforcer, au sein de l’enseignement supérieur, la valorisation d’alternatives aux systèmes de pensée dominants.

Décoloniser le féminisme signifie refuser de voir les femmes comme une catégorie homogène. Il existe en effet différents types de féminisme, en fonction de divers critères comme l’origine, la couleur de peau, etc. Ainsi, l’intersectionnalité vise à prendre en compte ces différents critères, qui constituent eux-mêmes autant de causes d’oppression. Vis-à-vis de la domination masculine, une femme blanche occidentale de classe moyenne livrera un combat féministe différent que celui d’une femme noire, pauvre, lesbienne ou handicapée.

Une pionnière méconnue en Europe

En 1984, elle publie le recueil d’essais « Sister Outsider ». Elle y aborde la complexité de l’intersectionnalité. Cet ouvrage est le seul de ses écrits à être traduit en français. Ainsi, comme beaucoup d’auteur·es noir·es, Audre Lorde reste méconnue pour une partie du monde malgré l’influence qu’elle a exercée au sein du féminisme afro-américain.

Son combat pour la décolonisation des savoirs et du féminisme doit encore être poursuivi à l’heure actuelle. Elle restera cependant une des plus importantes icônes du féminisme aux États-Unis et principalement pour les femmes lesbiennes et afro-américaines.

Edwige Conrardy, stagiaire à la FUCID et étudiante à l’HEPN, en Coopération Internationale

En savoir +

Audre Lorde (1934-1992) Poète guerrière, une émission de France Culture du 22/04/2017.

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